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Economie

Madagascar

Heureux de payer l’impôt !

samedi 2 août 2008 |  946 visites 

(Syfia Madagascar) A Madagascar, la population rurale, qui voit que ses impôts servent désormais à quelque chose localement, ne rechigne plus à payer l’impôt et même s’en acquitte avec un certain enthousiasme. C’est là un des effets de la décentralisation, mise en place il y a 5 ans dans la Grande île.

Marovelona un petit paysan de Sahambavy, un village proche de Fianarantsoa, à plus de 400 km de la capitale malgache, se précipite de bon matin au bureau de sa commune afin d’accomplir son devoir fiscal de citoyen. Malgré la journée très chargée qui s’annonce, il tient ainsi à apporter sa contribution au développement de sa localité. « Je me rends compte, dit-il, que l’impôt doit être payé pour qu’il y ait développement. En plus, nos enfants jouissent maintenant de belles infrastructures écolières réhabilitées grâce aux sommes collectées par les communes. »

Depuis 5 ans, les ruraux malgaches rechignent moins à payer des impôts. Le taux de recouvrement est passé de 20 à 80 % en cinq ans dans l’ensemble du pays, confirme Bernard Rakotoson, responsable de suivi au ministère des Finances et du budget. Ce surprenant résultat s’explique par la mise en place d’une fiscalité de proximité liée à la décentralisation. Les paysans ne considèrent plus le paiement de l’impôt comme une fatalité, mais comme une participation au développement de leur région. « Les contribuables n’attendent pas qu’on leur réclame l’acquittement, se félicite Andriamasy, trésorier de la commune rurale de Lohampary, dans la région du Sud-Est. Ils viennent de leur plein gré pour payer leur part. »

Auparavant, les habitants, ne voyaient pas clairement l’intérêt des impôts. Plus de 80 % de l’argent collecté allaient directement au Trésor public et les miettes qui revenaient aux communes ne servaient guère à améliorer les choses localement. « Chacun se souvient des infrastructures communales en état de délabrement total », rappelle Andry Tiana un opérateur local.

Confiance mutuelle et transparence

Depuis 2003, tout a changé pour les communes malgaches avec la décentralisation qui a renforcé leur rôle et mis en place vingt-deux régions. Une bonne partie des recettes fiscales leur revient désormais. « Si, auparavant, la commune n’en percevait rien, aujourd’hui l’argent des impôts est versé en totalité sur son compte », se réjouit Jean Honoré Mamihaja, le maire de Lohampary. La population rurale est assujettie à divers taxes et impôts et, notamment l’impôt foncier sur les terrains et sur la propriété bâtie. Tous contribuent à alimenter directement les caisses communales. Le budget de Sahambavy a ainsi doublé en deux ans.

Cet argent a surtout permis de réaliser des travaux visibles par tous : réhabilitation de salles de classe, construction d’une piste rurale et d’un pont reliant des quartiers, acquisition d’un terrain en vue de la construction d’une salle de fête… « Je ne me fais pas de souci : l’argent collecté est investi dans notre propre commune », assure Joseph Rajomalahy, un paysan.

Il en résulte un climat de confiance mutuelle entre les autorités locales et les villageois : tous ces petits projets sont réalisés et gérés en toute transparence. Un comité de citoyens est chargé du suivi des réalisations et fait un rapport régulier à l’assemblée générale des habitants. « Toute suspicion est levée, à en croire Suzanne Tsiresy, une mère de famille de Sahambavy. Nous pouvons consulter le budget communal, examiner les dépenses engagées à travers les divers affichages ou nous informer des futurs projets. »
Le paiement de l’impôt donne aussi l’espoir à ceux qui n’ont pas de certificat foncier, attestant qu’ils sont légalement propriétaires de leurs terrains, de voir un jour leurs droits reconnus. « Payer l’impôt foncier sécurise notre terre », estime Ratalata Harris, chef de quartier à Sambavy. Un autre facteur encourage également les citoyens à payer les impôts : les contributions sont fixées par la commune en fonction des revenus des ménages. « Je paye ma part d’impôt car ma bourse me le permet », confie Loby, une paysanne de Sahambavy.

Des paysans responsables

Dans chaque quartier, une campagne de sensibilisation est menée avant de recenser les avoirs des personnes susceptibles d’être assujetties à l’impôt. Tous les trimestres, la collecte et les petits projets communaux sont débattus par la population. Une fois fixé le montant à acquitter, chaque contribuable reçoit un avis d’imposition, qui précise le délai de payement. « La fiscalité de proximité est l’expression d’une décentralisation effective », estime Davi Robeson, responsable du volet fiscal de « Rapid Results Initiative » (RRI), un organisme qui se fixe des objectifs précis à atteindre dans un court délai.
Les contribuables, ainsi responsabilisés, ont mis en place des comités d’entretien pour chaque infrastructure. « La population veille au soin et à la préservation des acquis, résume Ra-Jean Marie, président du comité de gestion de la commune rurale de Lohampary. On ne se sent responsable que lorsqu’on est impliqué de près. »

Si la majorité des ruraux malgaches s’acquitte volontiers de leur nouveau devoir fiscal, le prélèvement de l’impôt dans les campagnes réveille parfois de mauvais souvenirs chez les plus vieux, comme Raleva, de Vaingandrano. Il se souvient encore que, du temps de la colonisation, l’impôt rimait avec pénalisations et que « confiscation de biens et séquestration étaient monnaie courante. »

Patrick Andriamihaja

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