Léonardo Simao, émissaire de la SADC de passage à Antananarivo, évite soigneusement de parler du référendum et de la mutinerie de la BANI. Alors que sans aucun doute possible, ces deux événements et leurs suites continuent d’influencer fortement l’actualité. Et c’est très diplomatiquement qu’il se contente de dire, lorsque nos confrères évoquent le cas de Fetison Rakoto Andrianirina et consorts, que les autorités en place à Madagascar doivent être attentives à veiller à la diversité et à la liberté d’expression.
Et voilà comment l’actualité se retrouve entre deux eaux. Comme tout ce qui se importe se déroule de manière sous-marine, il nous serait certes possible de remplir les colonnes d’hypothèses sur la suite possible des événements, ou de vous faire part de toutes les rumeurs dont la ville bruisse.
Nous n’en ferons rien. Le contexte oblige à préciser que ce n’est pas par peur. Mais parce que nous nous méfions comme de la peste des rumeurs non appuyées sur des faits vérifiables. Commenter les rumeurs, même pour en conclure qu’elles ne sont pas fondées, c’est souvent les accréditer. Et c’est exactement l’objectif que recherchent ceux qui les lancent.
Parfois, le silence est d’or. Et pas seulement parce que votre temps est précieux.
Évoquant la situation en Côte d’Ivoire, Gilles Lordet, directeur de la recherche de Reporters sans frontières, déclarait sans ambages que des organes comme « Notre Voie », « Le Patriote » ou « Le Nouveau Réveil » ne rentrent plus dans le champ d’une presse professionnelle, au regard des règles d’éthique, et qu’ils ont basculé dans l’information partiale, la propagande. Les parallèles que l’on peut faire avec la presse malgache sont évidents.
Les journaux ont tout à fait le droit d’avoir des préférences politiques. Mais il est de leur responsabilité de ne pas se laisser entraîner par la surenchère verbale. De nombreux journaux en Afrique servent de caisse de résonance à un parti, à un leader, sacrifient leur indépendance jusqu’à devenir parfois un simple organe de communication d’un acteur politique, avec les risques de polarisation, de renforcement des clivages et de montée des tensions au sein de la société que cela induit, à l’image de ce qui s’est passé à Madagascar en 2008 où la presse a de toute évidence joué un rôle néfaste dans les troubles qui ont agité le pays. Rien de bon n’arrive quand la presse elle-même mène campagne.
Nous ne sommes pas loin de penser que la crise sera aux trois-quarts résolue le jour où les journaux de la Radio nationale et de la TVM seront devenus attractifs et crédibles. Car la présence d’une presse sérieuse et ouverte obligera les acteurs politiques à tenir des propos responsables. Et dans ce contexte, le poids de la RNM et de la TVM, seuls médias à la disposition du plus grand nombre, est considérable.
La sortie de crise passera par Anosy, et pas forcément par le MAE.
Hélas, chaque fois qu’au cours des 15 dernières années, la TVM et la RNM nous ont promis de « changer », les promesses n’ont pas été tenues. Le réflexe « la voix de son maître » semble avoir durablement pénétré la culture d’entreprise des deux organes d’Anosy et de leurs antennes régionales.
Même si (pure hypothèse) une Loi sur la Communication encourageant un véritable professionnalisme venait à voir le jour dans notre pays, la TVM et la RNM ne changeraient sans doute pas du jour au lendemain. Il leur faudra sans doute aussi un rajeunissement des cadres pour retrouver l’amour de leur auditoire.
Et ce pas uniquement du côté du Tantara de 13h15.
Vos commentaires
Bonjour Patrick,
Ce problème s’apparente, à mon avis, à celui de la justice dans notre pays. Tant que la liberté de la presse ne sera pas assurée, on ne peut pas espérer une amélioration du secteur.
Déjà que les radios privées sont harcelées de milles façons dès qu’elles s’avisent de s’exprimerr à rebrousse-poil du parti au pouvoir. Il ne faut pas espérer alors que nos journalilstes fonctionnaires de la RNM/TVM se risqueraient à de telles acrobaties.
Ce qu’il faudrait c’est légiférer en vue de pénaliser les atteintes à la liberté de la presse.
Par la suite, il faudra également casser le monopole RNM/TVM sur la diffusion nationame des émissions. De la sorte, il faudra bien que cette radio nationale améliore son programme si elle ne veut pas être ignorée par la population au profit des radios/télés privées.
Enfin, il faudrait aussi imposer l’équivalent du « droit de réponse » en matière de presse écrite sur les émissions radios et télés.
Ce que vous dites est vrai :
– tant que les gens n’ont pas d’autres choix, il leur est difficile de faire de bons choix
Il reste beaucoup à faire car chaque fois qu’une personne veut avoir le pouvoir, la première chose qu’elle dise est : je laisse ouverte le TVM et RNM à tout le monde pourtant on fait le contraire.
La force de la communication est très puissante et elle permet d’endoctriner les autres. Comme elle est utilisée dans la mauvaise façon, ce n’est pas bon pour nous autres mais rentable pour celle qui arrive à le faire.
On peut déplorer l’existence d’une presse outrancièrement partisane, mais à mon sens c’est dans une large mesure un faux problème. Cela existe partout, y compris dans les démocraties les plus avancées (à l’exemple de FOX News aux USA).
Là où réside le vrai problème c’est que dans nos pays, moins démocrates, moins développés, moins « politiquement cultivés », lorsque des soi-disant journalistes commencent à propager des informations fallacieuses et colporter des rumeurs sans substance, en bref désinformer, il n’y a pas (ou alors très rarement) de voix de la profession journalistique pour interpeller ces manquements graves à l’éthique.
La seule stratégie valable pour contrer ces méthodes de propagande travesties en journalisme, c’est d’anéantir la crédibilité de ceux qui les pratiquent.
Tout a été dit en matière de presse par lemurkata et lambosoa mais j’aimerai juste rajouter que c’est justement c’est inégalité à l’accès à l’information qui est l’une des points faibles de notre pays, dans certaines régions, les presses écrites n’arrivent que deux voir trois jours après leur publication.
ce probleme de communication est fondamental, non au développement mais aussi au deficience des journalismes et ses pratiques et le « management » !
Ne verse pas la boue aux atres !!!! mais voir de prêt ce qui se passe au sein du journalisme et les industries des média !!!
Ce n’est plus les moyens de communication (routes) qui manquent, mais tout simplement l’Education de la population, quand on a le ventre vide, on se fout de ce que les politiciens disent et font, on de déplacera pour celui qui promet du riz, mais pour suivre les décisions, les lois, et les débats que voulez -vous que la populace en ait à faire,c’est plus facile de gouverner des incultes que le contraire, affamés qui plus est.désolé mais c’est ce qui se passe et dénote la peur des dirigeants d’avoir en face des gens capables de raisonner, pire comprendre et s’opposer aux décisions prises.c’est là la cause principale de ce désinteressement du peuple,qui n’y est absolument pour rien.
Les budgets votés ne vont-ils pas en priorité à tout ce qui peut« (maintenir l’ordre) », l’éducation, mais quel dirigeant s’en préoccupe ?
Nourrir les organismes de repression est plus utile a des gouvernants peu scrupuleux et qui n’ont pas la conscience tranquille,bien plus qu’eduquer ses compatriotes, voyons nous ne sommmes qu’humains.Je ne peux toutefois que regretter que cela soit ainsi, mais quel interet à cultiver des affamés,n’importe qui acquiecerait.
Il est dit que la presse est le contact et la distance à la fois. Sans la presse, qu’elle soit écrite, diffusée par les ondes et maintenant en ligne du web, on ne peut analyser des situations sans avoir des éléments de controverse. Pour pouvoir décrypter l’état politique dans lequel se trouve un pays, nul besoin d’être un Grand Reporter qui va sur le terrain et justement pour bon nombre de journalistes c’est en se basant sur les différentes lectures croisées de tous les journaux qu’ils puissent faire une synthèse. Qu’un journal soit réputée de telle ou telle tendance est l’essence même d’une démocratie. Pour avoir un esprit critique, il est même nécessaire de les juxtaposer.
Maintenant, il va sans dire que pour la crédibilité d’un journal, il ne faut pas lancer n’importe quoi, c’est-à-dire juste sur des rumeurs (et encore certaines rumeurs se confirment car les sources viennent de ceux-là même qui sont de l’entourage proche et ceux qui sont dans l’investigation sont friands de ces choses-là pour pouvoir travailler).
De tout cela, si on dit que le silence est d’or , c’est bien la preuve qu’il y a des choses à dire mais qu’il faut se taire. A mon sens, rester dans l’expectative est signe de l’expression bridée.
La liberté de la presse est encore loin d’être acquise.
« Comme tout ce qui se importe se déroule de manière sous-marine »
Mais qu’a donc bien pu vouloir dire l’auteur de cette lumineuse phrase ?
Mystère, mystère...
Est-ce qu’il y a un travail de relecture et de vérification chez Tribune avant la publication en ligne des textes ?
C’est vrai, je sais que, même quand vous mangez, vous les Malgaches, surtout du riz, il y a parfois des grains qui tombent. « Manger du riz alors des fois ça peut tomber » comme disaient vos ancêtres les Gaulois.